Édito n°13, mars 2007 – Le mariage de M. Ville et Mme Culture

Numéro 13 – Mars 2007

La culture étouffe dans ses frontières communales et cantonales. Pas étonnant que les coutures craquent les unes après les autres. Partout où les vases ne communiquent pas, les goulots s’étranglent, les crises éclatent, comme à Genève, avec le Théâtre de Carouge, la Maison de la Danse et le report des charges cantonales, comme à Lausanne avec les Docks, à Neuchâtel avec le « Plan d’intention en matière de politique culturelle », à Fribourg avec la construction du nouveau théâtre. Chacune de ces crises est vécue comme purement anecdotique, purement locale, et oscille d’un fantôme à l’autre. Et pourtant, ce n’est qu’une seule et même épidémie.

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Illustration © 2007, Bruno Racalbuto

D’un côté, on tremble devant le spectre de la centralisation des moyens en une seule main, censée donner trop de pouvoir à un Médicis lémanique… De l’autre, on désespère de ne pouvoir faire participer les riches communes de périphérie dont les habitants sont très friands de prestations prestigieuses reposant sur les seules ressources du chef-lieu…

De telles crises iront se répétant et se rapprochant tant que les artistes n’auront pas réussi à faire comprendre aux magistrats et hauts fonctionnaires que la culture ne pourra plus être efficacement gérée sans interconnexions et coordinations à l’échelle de toute une région : le Grand Genève peut-être jusqu’à Nyon, l’agglomération lausannoise, le Haut et le Bas neuchâtelois… Sans parler de Fribourg. Et sans relier ces régions entre elles par des organismes de coordination à l’échelle romande.

Dans chacune de ces agglomérations, il faut réunir d’urgence les États régionaux de la Culture, sans oublier ce qui manque presque toujours dans les initiatives des édiles prises jusqu’ici : une forte implication des artistes et des diffuseurs culturels.Et attention : tous ces efforts ne seront rien tant que les agglomérations ne bénéficieront pas d’une mise en commun et d’une mise à niveau des ressources financières dédiées à la culture. Lausanne ne pourrait-elle montrer l’exemple, et offrir sa taxe sur les spectacles en dot au mariage culturel de toutes les communes de son agglomération ? Et le canton de Genève ses 23 millions pour la culture, qu’il ne doit pas supprimer, mais mettre dans le pot commun ?

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